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Black Panthers |
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C'est en 1518 que la monarchie espagnole réussit pour la première fois à amener
des esclaves noirs en Amérique, après avoir massacré les populations noires
d'Afrique .
Beaucoup de noires pendant la période de l'esclavage se révoltèrent, s'enfuirent et fondèrent des petites
républiques indépendantes dans les zones délaissées par les colons européens.
Le commerce triangulaire, fondé sur
la traite des esclaves noires d'Afrique vers l'Amérique par les Européens,
permit une accélération de l'accumulation primitive du capital, aboutissant à
l'industrialisation. Le commerce triangulaire était mené au départ par des
marchands portugais et espagnols, puis par des Anglais et des Français.
Les bateaux chargés d'esclaves partaient d'Afrique de l'Ouest pour arriver à
Bahia (Brésil), Saint-Domingue, Haïti, Cuba et
Au milieu du 19ème siècle les Etats du sud des USA produisaient ainsi les 3/4
de la production de coton. Les esclaves noires produisaient le produit
d'exportation essentielle des USA et la matière première fondamentale pour
l'industrie européenne en développement.
Il faut noter que les politiques de colonisation n'auraient pas pu avoir lieu
sans la grande offensive patriarcale au 15ème siècle en Europe. La chasse au
sorcière a détruit les communautés de femmes, les connaissances féminines quant
à l'avortement et la contraception en général, la sexualité lesbienne… Les
femmes furent forcées à avoir entre 10 et 20 enfants.
Cette donnée patriarcale faut également savoir qu'au départ il y eut des
tentatives de mise en esclavage d'européens. Les Espagnols abandonnèrent très
vite au XVIème siècle devant le manque d'"esclaves" potentiels. Les
Anglais vendirent eux 90 jeunes femmes aux colons de Virginie, pour des kilos
de tabac.
Autre fait important: les noires avaient au départ (au 17ème siècle donc)
encore la possibilité de se "racheter" ou d'être affranchi, puis
d'avoir des propriétés et de voter. Les africaines n'étaient alors que la
minorité des esclaves, composées alors en majeure partie d'occidentaux
"esclaves à temps partiel" pour ainsi dire. Ces "indentured
servants" travaillaient en moyenne 7 années dans les plantations. Selon
une loi de 1640, toute femme de chambre blanche qui désobéissait pouvait
devenir esclave.
A la fin du 17ème siècle, l'esclavage "changea" de forme, et tous les
esclaves étaient noirs. Le racisme devint alors une forme de domination
reconnue et pratiquée à encore plus grande échelle. En 1660 les lois
interdirent aux noires de posséder des terres, de voter, de se marier avec des
blanches. A cela s'ajoutent les interdictions d'aller à l'école, de
s'organiser, de se rassembler, de travailler dans des postes qualifiés.
L'idéologie de la suprématie blanche vint alors justifier la domination et
l'exploitation des esclaves.
Au milieu du 19ème siècle les
esclaves noires - hommes, femmes, enfants à partir de 10 ans - travaillaient à
90% dans l'agriculture. Le fouet était le plus souvent la méthode pour
"éduquer" les esclaves, voire la torture. La résistance des femmes
noires, utilisant des moyens de contraception afin de limiter les naissances,
fut brisée par la violence, les viols. Parfois les femmes noires tuaient leurs
propres enfants pour ne pas en faire des esclaves.
Le viol était une méthode
institutionnalisée de terrorisme contre les femmes noires, qui n'avaient pas le
soutien des hommes noirs. Ces derniers étaient également éduqués de manière
chrétienne, c'est-à-dire qu'on leur expliquait que la femme était inférieure,
et qu'ils ne devaient pas faire des "travaux de femmes". Les femmes
étaient cantonnées dans certains métiers spécifiques (cuisine, santé, ménage…)
et le patriarcat des hommes noirs en était renforcé.
A la fin du 18ème siècle, 40% de la population des Etats du Sud des USA étaient
des Africaines devenues esclaves (et seulement 10% dans les Etats du Nord). En
1860 dans les Etats du Sud 1733 familles (formant le 1/3 de la population
blanche des Etats du Sud) possédaient chacune au moins une centaine d'esclaves.
En 1830 3777 personnes possédaient des esclaves.
Les 300 années d'esclavage des noirEs furent marquées par 250 révoltes des
esclaves. Sans compter les incendies, les sabotages, les empoisonnements, les
cours de lecture et d'écriture organisés en cachette.
Il y eut également la communauté "maroon", qui existait depuis 1642
en Floride, et avait été fondé par des noires en fuite. Les Indiens Séminoles
s'enfuirent là-bas vers 1750, et à partir de 1812 les USA tentèrent de détruire
la communauté, qui se transforma en 1816 en "Etat séminole afro indien".
Il s'agissait d'une fédération de villages d'Africaines et de Natifs Americains,
qui résistèrent ensemble à l'armée des USA jusqu'en 1842.
Mais la communauté maroon n'était pas la première "zone libérée":
-en 1598, sur le territoire du Brésil actuel, des Africaines fondèrent une
république de Palmarès, plus grande en taille que
-en 1739
-de 1791 à 1804 c'est Toussaint L'Ouverture qui conduit la révolte à
Saint-Domingue / Haïti, avec Christophe et Dessalines, contre les Français. Le
but, un Etat noir reconnu par les nations du monde, sera définitivement anéanti
en 1844 par l'arrivée de colons espagnols et la séparation de Saint-Domingue de
Haïti par l'Espagne et les USA.
Il faut noter ici que Toussaint L'Ouverture est considéré comme le fondateur du
nationalisme noir. Il a dépassé le repli isolationniste à la maroon, de la même
manière que Tecumseh l'a fait à la même époque pour la "nation
rouge".
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Le mouvement lancé va s'amplifier:
le 7 octobre 1800 1.000 personnes africaines armées et guidées par le général
Gabriel Prosser marchent sur la ville de Richmond en Virginie. C'est une date
symbole pour les Afro-américains en lutte pour leur propre nation.
Les blancs répondirent par la répression et l'organisation de milices imposant
l'interdiction de sortir entre 6 heures du soir et 6 heures du matin à
tous/toutes les noirEs.
Au niveau international c'est en 1807/8 que le trafic d'esclaves fut
officiellement interdit, après avoir coûté la vie à plus de 30 millions d'Africaines.
Mais rien ne changea aux USA. Le mouvement pour l'abolition de l'esclavage ne
réussit pas à s'imposer dans la rédaction de la constitution (guerre
d'indépendance, 1775-1783).
Le second mouvement abolitionniste,
issu d'une révolte en 1831, était confronté à trois problèmes centraux le
divisant:
-le rôle de la femme (interdite de présence lors des réunions);
-le soutien ou non au projet de rapatriement demandé par l'American
Colonization Society qui veut expulser les noires au Libéria;
-la question de la violence.
David Walker, un "affranchi", a formulé théoriquement la dernière
question. Voulant au départ une lutte démocratique pour modifier les lois, il
se prononcera ensuite pour un gouvernement des noires pour les noirEs. Ce
second abolitionniste a eu de l'écho dans les classes populaires blanches,
elles aussi confronté à la brutalité anti-démocratique du régime.
Le mouvement des femmes,
essentiellement petit-bourgeois, s'est lancé comme conséquence des luttes
démocratiques des noirEs.
Les noires organisèrent également clandestinement des "fuites" vers
des zones libérées. Harriet Tubman construisit ainsi un "undeground
railroad" (chemin de fer clandestin), avec des passeurs et des bases (les
"safe-houses"). Tubman s'était également enfui, et entendait aider
les autres à s'enfuir vers les USA du nord et le Canada, où l'esclavage
n'existait plus grâce aux réalités industrielles. En 1850 fut en réponse créé
une nouvelle loi, le "fugitive slave act", permettant la traque et les primes pour les esclaves s'étant enfuiEs.
Les noires organisèrent alors des groupes d'autodéfense.
Les USA du nord avaient développé une industrie et un secteur bancaire, tandis
que les USA du sud s'appuyaient sur une agriculture basée sur l'esclavage. La
situation se fit conflictuel au milieu du 19ème siècle. Jusqu'en 1860 en effet
le Sud avait nommé tous les présidents, et fournissait surtout leurs matières
premières à l'Angleterre.
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Les Etats du nord en eurent assez,
et durent réagir afin de pouvoir modifier les impôts, le crédit et l'ensemble
des politiques. L'objectif principal était d'empêcher les Etats du Sud
d'élargir leurs plantations; les USA étaient alors, comme l'Etat d'Israël, un
Etat de colons s'élargissant. L'Office of Indian Affairs dépendait du ministère
de la guerre, et
A chaque conquête les natifs indiens
furent repoussés vers l'Ouest. Puis au Sud il y eut l'expansionnisme au dépens
du Mexique: furent fondés les Etats du Nouveau Mexique, de Californie, du
Texas. Des parties des Etats du Nevada, d'Utah, du Colorado et de l'Arizona ont
également été prises au Mexique. La lutte armée contre l'occupation, forte
notamment en 1890 avec "Las Gorras Blancas" regroupant 1500
personnes, dure jusqu'à aujourd’hui.
La tension entre le Nord et le Sud fut partiellement résorbée avec le compromis
Clay, donnant à chaque Etat le droit ou non de pratiquer l'esclavage
traditionnel. Mais en 1854 lorsque le Kansas voulut abolir l'esclavage 3000
soldats du Missouri intervinrent et brûlèrent les habitations des noires, et
détruisirent en mai 1856 totalement la ville de Lawrence. Deux partis furent
alors fondés: le parti républicain défendait les intérêts des industriels du
nord, le parti démocrate les intérêts du sud. Puis une guérilla de blanches et
de noires écrasa en
La guérilla se développa sous la
conduite de John Brown qui tenta de fonder un Etat noir, mais elle sera
elle-même écrasée par les troupes US. La date de la pendaison de John Brown fut
considérée dans des dizaines de villes comme une date de deuil pour les noirEs.
Lorsqu'en 1861 un président républicain fut élu (Lincoln), 11 Etats du sud
firent sécession et fondèrent les CSA (Confederate States of America), dont le
gouvernement provisoire fut reconnu par les Français et les Anglais. Les Etats
du nord déclarèrent alors la guerre, disposant de 22 millions de personnes et
d'une industrie forte, alors que le sud n'avait que 5 millions de blancs et 4
millions de noires en opposition à l'esclavage. Parmi les 2,1millions de soldats
de l'armée nordiste, 180.000 étaient noirs.
Dans la vallée du Mississippi et en
Caroline du Sud les noires occupèrent les plantations et les gérèrent
eux/elles-mêmes. Après la victoire la situation fut très tendue, et Lincoln
assassiné en 1865. Les deux thèses quant à son meurtrier expliquent bien la
situation: soit il s'agit d'un sudiste radical, soit d'un membre des
républicains radicaux, partisans de la légalisation du pouvoir noir dans les
plantations occupées. Le nouveau président, Andrew Johnson, ancien propriétaire
d'esclaves, organisa une amnistie générale, une politique de réconciliation
générale, et une lutte armée pour récupérer les terres occupées. Mais le rêve
de
Beaucoup de blanches au sud
n'acceptèrent pas la fin de l'esclavage suite à la défaite face au nord, en
1867 les républicains accordèrent le droit de vote aux hommes noirs pour
empêcher l'arrivée au pouvoir des démocrates. Aux groupes violents de
"vigilantes" succéda alors le Ku Klux Klan, pratiquant un terrorisme
organisé pour empêcher aux noirs de voter.
L'esclavage n'avait été de plus aboli que formellement. Les esclaves libérés
dépendaient toujours de leurs anciens propriétaires en raison de
"contrats" de dettes. Les "arrangements", où les noires
louaient des terres un certain prix, se révélèrent être des pièges forçant au
travail pour rembourser les dettes.
Les « Black codes"
empêchaient les noires de vivre correctement: des amendes et la prison étaient
le lot s'ils/elles pêchaient, n'avaient pas leurs papiers, chassaient,
portaient une arme… Et la mort était le lot de ceux et celles accusées de vol
par un ou plusieurs blancs.
Comme l'a analyse Marx, la lutte entre le nord et le sud se fondaient sur deux
manières d'exploiter: l'esclavage tout court ou l'esclavage salarié. D'ailleurs
en 1870 les lois de Jim Crow instaurèrent la ségrégation raciale, la séparation
des noires et des blanches dans les transports en commun, l'exclusion des noires
des écoles, théâtres, restaurants réservées aux blancHEs.
Le mode de scrutin fut modifié,
"cassant" le vote des blancs pauvres et des noirs en raison du niveau
d'étude demandé et des sommes à payer pour pouvoir voter. La cour suprême des
USA accepta ses lois selon le principe du "separate but equal".
Au niveau économique, le capital du nord avala très vite le sud, contrôlant les
chemins de fer, les ports, l'agriculture, etc. La crise économique fut le lot
des noires, et elle fut telle avec les "locations" de terre qu'il fut
renoncé à les poursuivre, notamment à cause de la résistance violente aux
shérifs qui dura de la fin des années 1860 jusqu'aux années 1890.
La fin de siècle fut alors
caractérisé par une grande augmentation de la brutalité et des actions
violentes contre les noirEs. Face aux lynchages et aux viols se formèrent des
clubs de femmes noires, qui firent une conférence nationale à Boston en 1895.
Elles luttèrent notamment contre l'exposition universelle de Chicago de 1893,
diffusant la brochure "pourquoi l'Amérique de couleur n'est-elle pas
représentée" et menant des marches contre la ségrégation.
Les USA continuaient également leur expansion: annexion des Philippines, de
Hawaii, de Guam et d'autres îles du Pacifique, de Puerto-Rico, puis contrôle de
Cuba, Panama, la république dominicaine, le Nicaragua, Haiti. Au niveau
intérieur tout fut fait pour intégrer de force les réserves indiennes dans le
tout américain.
En 1874 par exemple les peuples
Lakota et Black Hills durent défendre leurs territoires militairement depuis
qu'on y avait découvert de l'or.
Les années suivant 1914 vont en empirant pour la nation rouge: à partir de 1934
les USA imposèrent des gouvernements de tribu, devant être reconnus
officiellement; ceci cassant les structures historiques où étaient présentes
beaucoup de femmes et possédant des perspectives sociales refusant les classes.
En 1953 la politique de la "termination" cessa toute aide et imposa
des impôts. Les réserves, déjà contrôlées et pillées, perdirent alors beaucoup
de monde partant gagner sa vie dans les villes.
Les années allant de 1900 à 1914 sont celles de l'éducation pour des afro-américaines
qu'on avait volontairement laissées dans l'analphabétisme avant et après
l'esclavage. De nombreux groupes organisés se formèrent, comme le NAACP
(National Association for the Advancement of Colored People) en 1905, qui
passera de 330 membres en 1912 à presque 100.000 en 1919.
Ou encore l'UNIA (Universal Negro
Improvement Association), fondée par Marcus Garvey et rassemblant jusqu'à 5
millions de personnes. Garvey défendait l'idée d'une nation noire où vivraient
tous/toutes les noires du monde entier. Il fonda la compagnie maritime « Black
star line", et était le partisan d'un capitalisme noir indépendant des
blancHEs.
Dans le même esprit fut fondé la "Nation of Islam" (NOI) en 1930,
conduite depuis 1934 par Elijah Muhammad. Leurs membres sont également connus
sous le nom de « Black muslims".
Partisans d'un capitalisme noir
dans les Etats du Sud et d'un Islam noir extrêmement puritain.
Plus intéressant est la formation du CPUSA (Parti Communiste des USA) en 1919,
que rejoignirent les membres dirigeants de l'ABB (African Blood Brotherhood),
anciens membres de l'UNIA partisans d'un Etat noir aux USA et de l'autodéfense
armée contre les lynchages.
Le CPUSA organisa l'ANLC (American Negro Labour Congress) pour les noires exclues
du syndicat l'AFL (American Fédération of Labour). Puis, sous l'impulsion de
Staline, le CPUSA et l'Internationale Communiste considérèrent que les noires
des Etats du Sud formaient une nation opprimée. Les communistes devaient en ce
sens soutenir la lutte démocratique nationaliste pour l'indépendance de cette
nation (il faut noter que les trotskystes rejettent cette analyse).
Lors de la montée du fascisme le CPUSA mena une politique de "front
populaire" et mis entre parenthèses les revendications sociales pour que
les USA entrent dans la seconde guerre mondiale. A la mort de Staline le CPUSA
devint révisionniste et se transforma en parti social-démocrate/social fasciste
(allant accuser le Black Panthers d'être des "fascistes noirs").
Traitons de l'aspect économique maintenant. La guerre de 1914 fit se cesser
l'immigration européenne, et pour la première fois des noires furent embauchées
dans les industries du nord, passant de 550.000 en 1910 à 910.000 en 1920, avec
un autre grand boom en 1945/47. La main d'œuvre noire devint l'armée
industrielle de réserve, le sous-prolétariat de ce qui était désormais la
première puissance impérialiste.
Dans les années suivant la crise de
1929, les noires organisèrent de grands mouvements de lutte, étant les premières
touchées avec les femmes, les Native Américains, les Chicanos, les
Puerto-Ricains. Le nombre de noires dans les syndicats passa de 100.000 à
500.000 (puis 1,25 millions en 1945), dans le Parti Communiste des USA de 1.000
à 5.000. Mais la situation des femmes n'avança pas, beaucoup tombaient dans une
nouvelle forme d'esclavage. Sur les 100.000 femmes de ménage noires de New York
de 1934, 350 étaient syndiquées. En 1960 35% des travailleuses noires étaient
employées de maison, 20% étaient balayeuses, repasseuses…
Mouvement
pour les droits civiques
Depuis les années
C'est
Le mouvement des droits civiques débute historiquement le 1er décembre 1955. Ce
jour-là, à Montgomery en Alabama, la travailleuse black Rosa Parks refuse de
céder sa place assise à un homme blanc. Cette place était réservée aux blancs,
il y avait au fond du bus un endroit pour les noirs.
Elle fut arrêtée pour cela, suivant
les lois locales sur la séparation des races. On avait déjà parlé auparavant
d'un boycott des bus et avec le succès à Bâton rouge une année avant des pas en
ce sens furent faits. Cette arrestation fut prétexte en conséquence à un
boycott qui dura 12 mois. Jusqu'à ce que la haute cour de justice considéra la
séparation comme illégale.
La lutte se fit dans la rue, avec des actions directes: boycott,
manifestations, sit-ins, rupture avec la loi sur les séparations, avec par
exemple les freedom rides, où des blancs et des noirs s'asseyaient les uns à
côté des autres dans les transports en commun.
Le mouvement des droits civiques se limita principalement au sud, là où la
séparation des races était la plus flagrante. On fit campagne pour le vote. En
1962 il n'y avait que 25% des blacks inscrits sur les listes dans le sud, à
cause des restrictions imposées par les fonctionnaires. On espérait, en
augmentant le potentiel de l'électorat noir, faire rentrer les noirs dans les
administrations, casser le système des castes existant dans le Sud.
Il y avait de grandes organisations qui côtoyaient des organisations locales:
-le Southern Christian Leadership Conference (SLCC) était en
-le Congress of Racial Equality (CORE), fondée en 1942;
-le Student Nonviolent Coordinating Comittee (SNCC ou aussi SNICK).
Ces trois groupes n'avaient pas de structures organisationnelles de haut
niveau; leur but n'était pas l'adhésion formelle. Les liaisons étaient plutôt
fonctionnelles. Il y avait aussi tous les gens qui par leurs activités
soutenaient le mouvement; en 1960 il y avait 50.000 personnes dans les
manifestations du mouvement.
Les membres du CORE et du SNCC venaient d'une sorte d'aristocratie ouvrière:
leurs parents venaient du Sud, leurs familles étaient pauvres et appartenaient
à la classe ouvrière, mais eux-mêmes étaient au Collège. Il s'agissait de gens
engagés, plein d'espoir, avec l'idée de dépasser les limites de la politique
orthodoxe du NAACP avec les méthodes de la désobéissance civile. Le SNCC
n'était pas, et ce dès le départ, une organisation spécifiquement Black, il y
avait environ 60% de noirs et 40% de blancs.
L'analyse du mouvement des droits civiques est de fait pleine d'illusions,
comme on peut le voir à travers les discours du pasteur Luther King qui a un
" rêve, un rêve profondément ancré dans le rêve américain ". On est
loin, comme on le verra par la suite, de la guerre anti-impérialiste contre les
USA prônée par Georges Jackson. D'ailleurs l'hymne du mouvement était: "
We shall overcome - some day ". Un jour...
La réponse du système fut claire. Insultes, coups, gaz, prison, torture,
assassinat. L'espoir des blacks de modifier leur situation par des appels à la
conscience des blancs ne marchait pas vraiment à 100%, malgré la sympathie
d'intellectuels libéraux blancs, notamment du nord, qui pouvaient sympathiser
avec le mode d'action et les revendications.
Le democratic party (les
démocrates) a soutenu ce mouvement, mais seulement parce qu'il y avait de
nouveaux votants, qui sympathisaient plus avec lui qu'avec les républicains,
encore plus réactionnaire. Aussi les dollars de soutien allèrent principalement
aux campagnes pour enregistrer les blacks comme votants.
Il y eut des succès, en deux vagues - 1957-1960 et 1964-1965. Il y eut même des
interventions des troupes US pour imposer les lois. De fait, la violence contre
les noirs (lynchage, terreur...) a été diminué, les blacks peuvent voter, ont
plus de représentations politiques. De plus la conscience Black s’est réveillé
- black is beautiful. La
haine de soi en a pris un coup.
Evidemment, ce qui satisfait la middle class ne suffit pas les masses noires.
La misère matérielle est toujours là, malgré des " droits " qui ne
sont en fait que formels. Et dès que les masses recommencèrent les soulèvement,
la middle class qui a su conquérir une position plus sympathique pour elle
s'empresse d'en appeler au calme et à l'ordre, au Law and Order, à
l'intervention de la police et de l'armée.
Il y eut une partie du mouvement qui se radicalisa, revendiquant la fin de la
discrimination dans les logements, le travail, etc. Mais le mouvement n'était
pas prêt à cette lutte - d'autant plus que cette radicalisation coupait des
libéraux blancs.
La conséquence est claire: il est nécessaire de trouver du neuf.
En 1965/66 le SNCC enlève le terme de " non violent " de son sigle et
le remplace par national. En 1966 les blancs sont exclus car d'aucune utilité
dans la communauté Black, leur est fait appel de s'organiser en tant que
blancs.
A l'opposé du mouvement des droits civiques, il y avait la nation of islam,
connu sous le nom de Black muslims. Fondée en 1934 par Wali Farrad, elle était
conduite depuis 1934 par le ministre Elijah Muhammad. il s'agissait en premier
lieu d'une secte religieuse, avec des règles strictes (pas d'alcool, de
cigarettes, de drogues, de danses, de flirts, de cinémas, de perte de son
emploi...).
A côté des temples dans les
ghettos, il y avait des restaurants, des magasins, des écoles, et même une
université (à Chicago). Il y avait un groupe d'auto-défense, Fruit of Islam. L'idéologie
de la secte considère que les blacks sont choisis par Dieu et que les blancs
doivent disparaître avec le démon blanc. Il n'y a pas grande chose à voir avec
le monde de l'Islam en fait, et d'ailleurs
Ceux-ci donnaient entre 1/3 et ¼ de
leur salaire à l'organisation. Le membre le plus connu était Mohammed Ali /
Cassius Clay. La prise d'un nom arabe ou africain au lieu d'un nom américain
est un phénomène en liaison avec cette " conscience " de l'oppression
Black.
Leur leader le plus connu était Malcolm Little, né en 1925 à Omaha, dans le
Nebraska. On le connaît sous le nom de Malcolm X. Il considérait en effet que
son nom avait été effacé par les blancs, volé. Il fut condamné en 1946 à 10
années de prison pour cambriolage, et contacta en prison des Black Muslims, et
après sa libération anticipée en 1952 il devient leur leader et organisateur le
plus significatif.
Il conduisit longtemps le temple de
Harlem à New York. Début mars 1964, après un voyage à
De Juillet à Septembre il voyagea
encore deux fois en Afrique et au Proche-Orient, ce qui l'éloigna encore plus
d'une théorie raciale et l'amena à un point de vue internationaliste. Il avait
participé à la conférence de l'Organization of African Unity au Caire, où il
prôna que les Etats africains amènent le problème racial US devant l'ONU.
Il ne réussit pas mais il y eut une
résolution qui condamna la discrimination aux USA. Puis aux USA Malcolm X
continua de " prêcher ", mais cette fois, et à la différence du
mouvement des droits civiques, en faveur de la violence révolutionnaire. Parce
qu'" en se mettant à genoux et en priant on n'obtient aucun droit ".
Il prôna la formation de rifle clubs pour défendre les communautés blacks.
A un meeting qu'il tint le 8 avril 1964 à un rassemblement du Militant Labor
Forum, d'ailleurs devant un public au ¾ blanc, il affirma que " La
révolution noire est en cours en Afrique, en Asie et en Amérique latine; si je
dis noir, alors je ne veux pas dire blanche, mais noir, marron, rouge ou jaune.
Nos frères et nos sœurs en Asie, qui ont été colonisé par les Européens, et les
paysans en Amérique latine, qui ont été colonisé par les Européens, tous
ceux-là se retrouvent depuis 1945 dans une lutte pour éloigner de leurs pays
les colonialistes et les puissances coloniales, les Européens.
C'est une véritable révolution.
Révolution basée toujours sur la terre. Une révolution ne se base jamais sur la
volonté que quelqu'un nous apporte une tasse de café intégrée. Des révolutions
ne peuvent jamais être obtenues, si l'on tend sa joue à l'autre. Les
révolutions ne se basent jamais sur le " tu aimeras tes ennemis et prieras
pour ceux qui t'offensent et te poursuivent ".
Et les révolutions ne sont jamais menées
simplement en chantant " we shall overcome ". Les révolutions se
basent sur les effusions de sang, les révolutions ne sont jamais des compromis,
ne reposent jamais sur des négociations.
Les révolutions ne reposent jamais
sur une sorte de cadeaux; les révolutions ne reposent pas non plus sur la
demande mendiante d'être accepté dans une société corrompue ou un système
corrompue. Les révolutions renversent les systèmes. Et sur cette terre il n'y a
pas de système qui se soit révélé plus corrompue, plus criminelle que ce
système qui colonise en 1964 encore 22 millions d'Afro-américains, qui a
toujours comme esclaves 22 millions d'afro-américains ".
Il modifia encore une fois son nom, en El Hajj Malik El Shabazz. Mais c'est
sous le nom de Malcolm X qu'il est le plus connu. Il se fit descendre le 21
février 1965, pendant une allocution à Harlem. La fille de Malcolm accuse les
Black Muslims et a d'ailleurs essayé de tuer celui qui est leur leader ou au moins
un responsable moral de l'assassinat de celui dont la signification pour le
mouvement black est grand: Malcolm X. L'OAAU elle s'écroula peu après.
Théorie
du « Black Power!"
Lorsque le 6 Juin 1966 James Meredith, figure symbolique du mouvement pour les
droits civiques, se fit descendre lors d'une Freedom March dans le Mississippi,
le mouvement " we shall overcome " se divisa. L'exigence de l'aile
radicale, " freedom now ", se transforma également en " we shall
overrun ". Stokely Carmichael utilisa le terme de « Black power
" comme slogan et résuma ainsi la pensée d'une partie du mouvement.
Black Power " est un appel aux
noirs de ce pays à s'unir, de reconnaître leur héritage, de développer un sens
civique ". Il s'agit que les noirs aient des propres buts, conduisent
leurs propres organisations, les défendent, refusent les institutions racistes
et les valeurs de la société existante.
Il s'agit " d'en arriver à nos propres notions, avec lesquelles nous nous
définirions nous-mêmes ainsi que notre relation avec la société ".
L'importance des propres
définitions du mouvement a été souvent soulignée par Stokely Carmichael. Il
cita ainsi un livre d'enfant de Lewis Caroll, Alice derrière le miroir. [Le
traducteur de ce texte n'ayant pas lu l'œuvre en question, problème! Résumons
ainsi: il y a un personnage qui dit à Alice: " quand j'utilise un mot,
alors c'est que je le considère comme juste - pas plus, pas moins ". Alice
répond: " oui mais il se pose la question de savoir si on ne peut pas
donner un autre sens au mot ". Et le personnage de dire alors: " la
seule question qu'il se pose est de savoir qui est le plus fort, c'est tout
".]
Le livre de Carmichael et Hamilton, Black Power, sous-titré la politique de la
libération en Amérique, tente de définir et résumer ce concept. Le point de
départ est l'analyse de l'Amérique noire comme colonie dans la mère patrie,
comme dit plus haut.
Etant donné que cela ne sert à rien
d'espérer de l'Amérique blanche qu'elle abandonne ses discriminations, il faut
que les noirs organisent leur propre pouvoir: Black Power . Il s'agit de
défendre ses propres intérêts que personne d'autre ne peut défendre. Pour
pouvoir participer à une société pluraliste (avec les blancs) il faut d'abord
être unis si l'on veut être sur un plan d’égalité.
Evidemment, on peut se douter que la critique classique et petite-bourgeoise,
celle du " racisme à l'envers ", a fusé. Mais cela est faux, parce
que les noirs n'oppriment aucun autre groupe, mais veulent s'auto définir et s'auto
réaliser sans la domination d'autres groupes. " La pleine participation au
processus de décision, tant que cela touche la vie des noirs ".
Pour gagner ce contrôle, il ne suffira donc pas de gagner des positions dans la
structure de pouvoir. On cite l'exemple de la case de l'oncle Tom. " Une
image d'apparition noire n'est pas encore un 'pouvoir noir' ".
On doit également se débarrasser du principe de non-violence. Les blancs
l'utilisent, on doit pouvoir répondre. L'auto-défense sera le maître mot des
Black panthers.
Ce n'est que lorsqu'on en sera arrivé au Black power que sera possible un
travail avec des groupes blancs. Pour ne pas reproduire indéfiniment la
situation du mouvement des droits civiques: une collaboration entre des blancs
tout puissants et des noirs dépendants.
En se positionnant comme Black Power, les noirs entendent refuser le racisme
des blancs, ne pas accepter les règles du jeu. Exactement comme les autonomes
se refusent à participer aux institutions, partis et syndicats révisionnistes
et bourgeois pour rompre totalement avec le système impérialiste-capitaliste.
Il n'y a pas à accepter l'exploitation (ou le racisme), il faut organiser un
contre-pouvoir éliminant ces oppressions.
Le concept de Black Power proposé est plus un cadre qu'un programme. C'est dans
la pratique que va se décider concrètement la construction du Black Power.
Naissance du Black Panther Party
Le 15 octobre 1966 Huey P. Newton et Bobby Seale fondent à Oakland, en
Californie, le Black Panther Party for Self-Defense.
Parlons un peu de la biographie de ces deux personnes. Huey Percy Newton est né
le 17 février 1942 à Oak Grove, en Louisiane. Il est le plus jeune d'une
famille de sept enfants. Son père, ouvrier, trouve du travail à Oakland et ils
partent tous là-bas.
Newton vit dans la rue, et comme
tout le monde a des problèmes avec la police et a des procès. En 1962 il est
condamné en sursis pour avoir attaqué un policier. En 1964 il prend 8 mois
ferme et 3 ans avec sursis pour avoir planté quelqu'un [avec un couteau]. Il
est allé au Merritt College à Oakland et pendant peu de temps à
Bobby Seale est né le 22 octobre 1936 à Dallas au Texas. Il grandit avec un
frère, une sœur et un cousin. Il devient mécano après une enfance pauvre, va à
l'armée dont il est viré, puis se retrouve dans l'aéronautique. En 1960 il va à
Oakland, et va de temps en temps au Merritt College, où il rencontre en
septembre 1962 Newton.
Ils travaillent de temps en temps
dans les mêmes groupes politiques, mais pas au même moment. En été 66 ils ont
tous les deux un travail dans le programme d'aide aux pauvres, Seale comme
maître d'œuvre, Newton comme Community-Organisator.
Leur nouveau parti n'avait rien à voir avec le Lowndes Country Freedom
Organization, qui si elle avait également comme symbole une panthère, se
voulait alternative aux partis démocrate et républicain (évidemment c'est
l'échec aux élections).
Le Black Panther Party for Self-Defense se distingue de ce groupe déjà
par l'appel à l'autodéfense armée organisée des noirs contre les attaques de la
police, et les agressions contre les racistes blancs. C'était un de leur point
central. Newton expliqua que leur symbole l'exprimait clairement: " la
panthère est un animal qui n'attaque jamais.
Mais s'il est attaqué ou poursuivi,
alors il se soulève et efface celui qui l'attaque ou l'agresse - absolument, de
manière décidé, totalement, à la base, de fond en comble ". Il ne s'agit
pas de la première tentative d'auto organisation. Robert F. Williams,
secrétaire du NAACP à Monroe, en Caroline du Nord, appelle depuis 1957 à se
défendre contre la terreur du KKK. Lorsque le FBI voulut l'arrêter en 1961, il
s'enfuit à Cuba, puis en Chine populaire. La seconde tentative a consisté en la
formation des Deacons for Defense and Justice en différents endroits de
Le programme en dix points qui suit est le programme du parti. Il n'a jamais
été changé, sauf en ce qui concerne le point 3. Le 27.12.1969 on remplace la
formule " par l'homme blanc " par " par les capitalistes ".
L'agitation commença avec 1000 exemplaires de ce programme dans la communauté
de Oakland. Ils discutèrent dans la rue, expliquèrent le programme. On ne peut
pas vraiment parler de parti, avec seulement deux personnes. Néanmoins Newton
se proclama ministre de la défense du parti et Bobby Seale président.
Le premier adhérent fut Bobby
Hutton, 15 ans. " Cela commença ainsi: avec des rassemblements dans la
rue, en parlant beaucoup de violence et avec un peu de bagarres à l'intérieur
de la communauté d'esprit noire et beaucoup d'enrôlement - personne ne sait
combien - dans la rue ".
Newton et Seale parlèrent en fait principalement du point 7, celui de
l'auto-défense. Ils prônèrent la formation de groupes de 3-4 pour liquider les
policiers racistes, lancer des bombes incendiaires et en fait, comme but, la
liquidation de l'armée d'occupation blanche.
Leur première arme fut un fusil M-1 et un pistolet 9mm. Ils reçurent cela d'un
révolutionnaire japonais, qui les donnèrent gratuitement (Newton et Seale
n'avaient pas d'argent mais persuadé le camarade de le donner afin qu'ils
" puissent commencer à préparer le peuple à un combat révolutionnaire
". Ils étudièrent les règles du port d'armes, apprirent le droit quant à
ce sujet.
Ils formèrent une infrastructure organisationnelle: un local au coin de la
56ème rue et de
Le « Black Panther Party » est né.
shenoc le 01/11/05
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